smoke & trouble.

y'a pas d'heures pour son apparition. parfois le jour, parfois la nuit, souvent entre les deux. de l'ouverture à la fermeture, le va et vient uniquement décidé par le grommelement de l'estomac. ausssi simple que compliqué, son horaire imprévisible un atout dans ce monde où sa tête est mise à l'affiche et où les chasseurs sont cachés à tous les recoins. fait, malgré tout, pas grand effort pour se dissimuler ; les back alleys du quartier devenus familiers et sa population aussi. ils ont tous une histoire et tous des raisons de ne pas mettre le nez dans les affaires des autres -- chacun se satisfaisant de cette proximité indifférence.

le red strings est atteint en quelques minutes, un hochement de tête offert à la propriétaire des lieux alors qu'il prend sa place habituelle au bar. il a pas besoin de dire quoi que ce soit, est devenu un habitué de l'endroit à son tour. la bière est placée devant lui ; sa commande toujours la même, à ne plus avoir à y gaspiller sa salive. what are they fighting about this time? la tête qui pointe en direction de deux habitués qui meublent tout l'espace de leurs voix crescendo. gamine qu'est peut-être la première à entendre ses mélodies de la journée, à le sortir de son encéphale pour rejoindre le monde des vivants.

aujourd'hui, c'était l'une de ces énièmes journées qui se ressemblent toutes.
de celles qui commencent aux aurores avec une cigarette embrasée dans un lit froid.
comme la version vie réelle des épisodes filler de séries sans fin de la cw. de ceux que t'oublies cinq minutes après la fin, qu'apporteront jamais rien à l'histoire - qui sont juste là pour combler le temps jusqu'à ce que la mort te rattrape.
et pourtant, y a des routines qui brisent toujours la monotonie. de celles dont l'habitude n'apporte pas lassitude, mais cultivent le potentiel d'une distraction bourgeonnante - comme la possibilité enivrante de briser l'ennui.

comme l'arrivée de certains habitués dont la présence entraîne toujours une vague de chaleur réconfortante, leur présence au bar un step répété d'une routine connue par cœur.
les phalanges s'agitent, hantées par cette danse éternelle - une pinte de bière et quelques mandus fumants se retrouvant silencieusement devant l'homme assis au bar. idiot #1 stepped over the line as he scored a bull's eye- d'expliqué nonchalamment alors qu'elle hoche la tête en direction de l'un des deux habitués se donnant en spectacle. so idiot #2 is adamant he didn't actually lose the game. le torchon quitte son épaule pour venir éponger le bar distraitement, comme la nécessité de constamment être en mouvement. the prize is a date with the loser's sister. charming, right? les mots paraissent désintéressés et pourtant c'est une pointe d'amusement qui souligne ses syllabes - les idioties de ses habitués qui seront toujours là pour la réconforter.

tombée de la nuit comme période favorite. à pouvoir finalement délaisser le masque de fausseté alors que la silhouette sculptée s'enfonce dans les tréfonds du nord est — larmes séchées errant encore sur les traits innocents.
trois longues années à feindre l'héroïne en détresse, abusée par son vilain bien-aimé.
condamné par la déesse pour sa trahison, condamné par l'épouse pour son abandon.

si cruel avec elle mais, les sentiments de meixi persistent. l'obsèdent. elle est prête à tout lui pardonner, incapable de tourner la page.
si nombreux à raconter qu'elle mérite mieux que lui ... une bande d'ignorants. il n'y a pas meilleur homme que son mari. cette société manipulée le pense savant fou, délirant danger. des balivernes qu'elle ne réfute qu'en secret. elle ne voudrait perdre l'appui du public pour pouvoir le retrouver après tout.
yansheng est simplement égaré. trompé par les paroles de ces crétins némésiens. le tendre époux devrait aujourd'hui briller de son prestige médical, mais le voilà à se cacher comme un rat dans l'ombre.
à ainsi s'en faire le devoir de le ramener du bon côté, dans leur foyer désormais glacial et tous leur faire payer pour ruiner son avenir de la sorte.

tel un rituel, la chasse quotidienne commence par un passage au red strings. hélas, des repères préférés de mr yuwen. bar misérable qu'elle déteste autant que sa propriétaire. blacklistée de l'établissement après avoir pulvérisé l'une des parois. mais elle n'est qu'à demi-responsable, un incident qui aurait pu être évitée si cette vaseuse veuve arrêtait de l'induire en erreur.

de toute évidence, un bannissement qui ne l'empêche de faire une arrivée dramatique dans le bar. dès lors que la porte est claquée sans ménagement, le corps se traine à l'intérieur. le sourire teinté de brutalité s'efface pour laisser place à une moue exagérément pleurarde à son approche des tabourets, étrangement vides. hi again, pretty widow la voix atrocement douce, au point d'en être désagréable. i'm feeling sad again, tell me you got some news for me about you know à en lâcher soufflement simulant sentiments de tristesse, my beloved husband? menace hantant les prunelles luisantes.  

les pas d'une danse pratiquée jusqu'à ce qu'elle devienne part de soi. les offrandes placées sous le nez alors qu'il jette un regard aux alentours. la main qui trouve la courbe du verre pour y tremper les lèvres asséchées. hoche la tête en simple réaction à l'exposition ; portrait digne d'une sitcom qu'on met à l'écran avant de l'oublier -- white noise familier. " romance is still alive. " qu'il acquiesce finalement avant de se reconcentrer sur les boulettes fumantes ; le goût devenu réconfortant explosant sur les papilles gustatives. c'est paisible, aussi paisible qu'un tel endroit puisse l'être... trop paisible même. y'a un sentiment de malaise dans le fond des entrailles qu'il saurait pas expliquer. juste, c'est là, et ça pèse, ça refuse d'être oublié.

il manque recracher sa bouchée quand la raison se présente. porte qui claque, impose le silence à la dispute qu'est toujours pas fini pour attirer tous les regards. il la reconnait bien là. pas celle qu'il a aimé, mais le monstre d'ego qu'elle est devenue. " fucking hell. " qui glisse en grognement des lippes. juste assez fort pour que keiko l'entende, mais personne d'autre. et dans ces trois syllabes, milles choses qu'il essaie de lui partager. la plus importante : ses plus plates excuses pour tout ce qui se déroulera dans les murs de son établissement.

trop longtemps qu'ils ne s'étaient pas revus ; c'était qu'une question de temps avant qu'elle le retrouve. le compteur dans son encéphale conscient que son temps filait à toute vitesse. et dans la confusion du spectacle, il glisse derrière le bar.

y a une certaine fierté à voir quelqu'un apprécier la nourriture qu'on lui offre ; un instinct enfoui au plus profond d'elle qu'elle a pas l'envie d'analyser. parce que c'est pas quelque chose qu'on lui a appris, pas une douceur à laquelle elle a été habituée. et pourtant c'est d'une tendresse inexplicable qu'elle prend soin de ses habitués comme des siens, avec une rage incoercible qu'elle les défendra jusqu'à son dernier souffle ; les crocs luisant d'un vermeil étranger aux notes métalliques.

c'est ce même goût cuivré qui s'empare de ses papilles quand la tornade athénienne s'abat soudainement sur les lieux, s'empresse de rompre tout semblant de sérénité si propre au red strings. c'est d'abord le regard de yan qu'elle vient chercher, trouve au fond de ses pupilles un millier d'excuses qu'elle lui demandera jamais de prononcer ; y devine également une requête qu'elle ne peut s'empêcher d'accorder - d'oser braver la tempête pour tenter de les sauver. you're sad? aw. doucereuses syllabes dégoulinant de tout le dédain qu'elle possède pour l'héroïne de cette Olympe infernale. son regard se pose alors sur les mandus brûlants abandonnés sur le bar, la pinte de bière à peine commencée à leurs côtés - l'empreinte de celui qu'elle cherche si désespérément que l'on apercevrait presque dans les perles de condensation dévalant le verre délaissé. i don't see how that would ever be my problem. et elle sent la présence de l'homme convoité à ses côtés, accroupi derrière ce bar devenu rempart comme le plus grand secret qu'elle se doit de garder - l'impératrice qu'elle se doit de chasser. les phalanges s'enroulent autour de l'une de ces boulettes à l'existence damnation, l'amènent jusqu'à ses pulpes pour la croquer. and i'm afraid you're going to be sad a while longer. la bouchée qu'elle vient avaler avec une gorgée - une nouvelle pinte qu'elle lui reversera une fois que le danger sera passé. i have no idea where your... beloved husband is. le mensonge est si naturel au creux de ses lèvres tirées, la moue désolée comme pour couronner sa performance magistrale.