A slip that commits nothing - ft. Bae Soan

L’être humain demeurait si imprévisible, autant par son authenticité que par sa complexité. Chaque individu possédait ses qualités et ses défauts, le quota pouvait être plus ou moins négatif en fonction de la personne, mais un certain équilibre subsistait. Enfin, il ne s’agissait là que de l’avis subjectif de Hongdan. L’héroïne avait conscience de ses capacités, de la puissance de son pouvoir, mais également celui de ses convictions. Sa plus grande fierté était également son plus lourd fardeau : son travail. Vivant pour ce dernier, elle demeurait tout bonnement incapable de faire autrement. Les jours de congés n’avaient aucune saveur s’ils lui imposaient une solitude démoralisante. Ainsi... Si rien n’était prévu avec quelqu’un, la demoiselle préférait travailler plutôt que d’affronter la morosité de sa résidence. Prendre un animal de compagnie ne serait pas une mauvaise idée, mais l’idée d’être plausiblement en déplacement pendant quelques jours l’empêchait de sauter le pas. Elle était tout bonnement incapable d’avoir une vie personnelle. Son existence même se résumait dans sa profession, ses collègues et amis. Ni plus ni moins.

Même si elle n’était pas bien bavarde, elle demeurait épanouie dans son travail, à défaut de l’être dans la sphère privée. Ce fut certainement l’une des raisons qui la mena à se rapprocher un peu plus de ses collègues, partenaires et amis. Sa relation avec Bae Soan était courtoise à l’époque, puis les événements dans sa vie permirent une forme de rapprochement plus intimiste. Jusqu’à ce fameux soir où une limite fut franchie. La solitude, le manque de tendresse et ce besoin instinctif d’affection avaient pris le dessus sur la raison. Certes, ce genre de dérapages n’avait rien de grave, ni de honteux. Cependant, une gêne s’était installée. Eux qui étaient tant respectueux des règles et plutôt sages... avaient cassé cette barrière. Hongdan ne se sentait pas particulièrement mal, cela lui avait fait énormément de bien. L’espace d’une soirée, elle s’était sentie de nouveau femme et pas seulement “Sea”.

Depuis ce débordement, ils n’avaient pas eu l’occasion de se reparler. Le travail et les responsabilités demeurant bien plus importantes et préoccupantes. Elle devait s’occuper de ses élèves en tant que mentor et lui avait ses propres responsabilités et devoirs au sein du syndicat.
Après quelques jours sans même se croiser, Hongdan avait été missionné pour assister Soan. Visiblement, une dispute entre deux héros avait été éclatée. Le self-control n’était pas à la portée de tous. Un léger soupir franchissant la barrière de ses lippes, la demoiselle s’était rendue sur place, voyant déjà son ami présent et attentif. Ses propres phalanges la démangeant face à la scène. Un conflit ne devait pas nécessairement se régler dans la violence. L’héroïne avait pour ordre de n’intervenir que si Soan lui en donnait l’indication. Croisant ses bras contre sa poitrine, elle se plaçait à la droite de son ami avant de saluer.  

- Bonjour.

Une phrase banale, courte et courtoise. Il ne fallait pas perturber la concentration du membre du syndicat. Ses iris se baladèrent sur la scène qui semblait dégénérer... “Bête et disciplinée”, elle ne bougeait pas d’un pouce. Même si elle avait eu l’occasion de fréquenter les membres du syndicat, elle n’en faisait pas partie et elle ne connaissait pas particulièrement les règles de cette administration.  
A l’évidence... Après cette histoire réglée, Hongdan comptait bien clarifier la situation avec lui. Continuer de faire comme si de rien était ou de fuir la réalité n’apporterait absolument rien. À savoir si lui aussi avait envie d’être de dialoguer sur la question ou s’il préférait encore éviter le sujet.  

Il a fauté.

Soan n’a pensé qu’à ça ces derniers jours ; la scène se rejoue constamment sous ses yeux, alors que les corps fusionnent de manière éhontée – les deux ayant assez bu pour s’en retrouver totalement désinhibés mais trop peu pour ne plus être en possession de leurs moyens. Tout cela n’avait fait qu’alimenter sa culpabilité. Non pas qu’Hongrant ne lui plaisait pas ou n’était pas joli, simplement, ils étaient censés être amis. Et les amis, en théorie, ne se retrouvent pas nus l’un au dessus de l’autre sur le canapé. Soan ne s’enlevait pas l’idée qu’il avait peut-être tout gâché ; d’autant plus que ce n’est pas comme s’ils avaient pu mettre les choses à plat en amont – non, il avait fallu qu’ils n’en fassent qu’à leur tête alors qu’ils étaient bien installés dans leur routine. Soan n’est habituellement pas prude, mais il préfère quand les choses sont claires dès le départ, d’autant plus qu’il n’est pas un habitué des coups d’un soir… contrairement à d’autres.
Et s’il était d’un habituel cynique, cette fois il est gêné, car Hongdan est son amie. Si ça avait été une autre fille, il aurait sûrement trouvé un prétexte pour mettre fin rapidement à la conversation.

Depuis, Soan avait donc prétexté être débordé par le travail ; et il l’était. Juste plus que d’habitude. A courir dans les couloirs d’Athena alors que deux héros avaient commencé à se battre dans les locaux, faisant usage de leurs pouvoirs respectifs. Son supérieur lui avait fait rapidement fait savoir qu’il lui envoyait du renfort pour l’aider si besoin était.

A peine arrivé sur les lieux, il prend quelques secondes pour observer la scène, soupirant. Il prend une minute pour reprendre son souffle, ne veut pas être essoufflé quand il devra souffler dans les bronches de ses deux jeunes héros.
Il sursaute quand la voix de sa collègue à ses côtés. Vraisemblablement, il ne l’a pas vu arriver. Il lui adresse un bref regard - pour vérifier que c’est bien elle. C’était donc elle, les « renforts ».

— Salut, il rétorque rapidement.

Il s’avance vers le duo qui ne semble pas avoir remarqué leur arrivée. Son regard suffit à annuler leurs pouvoirs, à les laisser hébété dans leur bagarre, qui ne semble plus avoir de sens sans leur capacité. Ce n’est pas le moment de se laisser perturber par Hongdan et la possible discussion qui pourrait avoir lieu dans un futur beaucoup trop proche.

— Vous êtes pas un peu trop grands pour que je sois obligé de venir jouer les babysitters ?

Soan était-il en train de calmer une bagarre ou d’un démarrer une ? Quoi qu’il en soit, son arrivée ne semble pas faire pâle impression, à l’instar de leurs visages qui se décomposent. Le héros peut être aussi cynique qu’il le souhaite ; à ce moment précis, c’est lui qui aura le dernier mot quoi qu’il arrive.

— On se disperse et surtout on oublie pas de passer dans les bureaux d’Athena pour récupérer sa punition.

Il se tait une seconde avant de rajouter :

— Apprenez à vous tenir, bordel. C’est pas parce que vous avez des pouvoirs que ça doit être la foire et être la solution à tout.

Et Soan, il parle en connaissance de cause. Il fait un signe de tête à d’autres membres du syndicat, l’air de dire « amenez-les », les laissant seuls tous les deux.  

L’ignorance ne s’abattit guère sur ses épaules. Après de nombreux jours à l’éviter, la demoiselle s’était questionnée intérieurement sur la plausible réaction de son ami. Vraisemblablement, il avait pris la peine de lui répondre malgré l’urgence de la situation. Bien, au moins... Le dialogue à venir ne sera pas avorté à peine entamé. Malgré tout... Cette bagarre eut une saveur bien différente quand les deux protagonistes ne purent plus utiliser leur pouvoir. Expression d’étonnement, regards tournés vers celui qui prenait la parole et enfin blêmissement du teint se fit remarquer. A l’évidence, ils avaient pleinement conscience d’avoir commis une grave erreur. Certes, un brin de défoulement ne faisait de mal à personne. Mais quitte à se battre, autant ne pas se donner en spectacle, surtout face à des individus zélés du système...  
Brillant par son efficacité, Soan avait réglé la situation avec aisance et rapidité. Oh... Assurément, elle ne ferait guère la fière à la place des deux bout entrains... Cependant, ce n’étaient pas ses affaires. Les sanguins furent tout de suite pris en charge après la remontrance effectuée, offrant une forme d’intimité entre les deux amis. Enfin... Si supposés qu’ils pouvaient se nommer comme tel. La clarification s’imposait. Nul besoin d’observer les lieux pour constater qu’ils étaient totalement seuls et à l’abri des oreilles indiscrètes.  

- Ma présence n’était pas nécessaire, finalement.

Un constat simple et plutôt franc. Malgré tout, cette demande de renfort l’arrangeait. Elle s’approchait de son ami avant de tirer gentiment sur la manche de son vêtement, comme une tentative de capter son attention, voire son regard.  

- Tu avais beaucoup de travail, mais tu m’évitais également.  

Difficile de ne pas le remarquer. Hongdan demeurant bien placée pour connaître l’étendu de sa charge de travail, elle n’en était pas moins observatrice. Ce genre de situations gênantes pouvait faire planer un certain nombre de doutes. Avait-il des regrets ? Etait-il dégoûté par ce qu’il s’était produit ? Pour sa part... La jeune femme gardait un bon souvenir de cette étreinte. La sensation de ses phalanges caressant sa peau, la délicieuse pression de ses lèvres contre les siennes, la chaleur enivrante de l’enlacement intime. Le tout lui procurant un délicat frisson qu’elle parvint à dissimuler.  

- Si ça t’a déplu, autant me le dire plutôt que de fuir.  

Ruiner une amitié aussi solide que la leur, pour une expérience qui aurait été ressenti déplaisante pour lui, serait un profond gâchis. Néanmoins... Cette distance volontaire avait conduit à une certaine frustration. Hongdan relâchait le tissu pour finalement glisser sa main dans la sienne. Ce simple toucher lui faisant visualiser leur dérapage dû à l’alcool. Même si ce ne fut qu’un instant, cette proximité lui avait fait un bien fou... Ainsi, elle se permit d’ajouter.

- Je ne regrette pas, ça m’a fait beaucoup de bien.  

Difficile de mettre des mots dans ce qui s’était produit, surtout s’il était mal à l’aise... Réfléchir à chaque parole afin de ne pas blesser ou lui éviter la gêne. La demoiselle reprit.  

- C’est venu naturellement. On devait en avoir besoin.  

Réitérer l’expérience ne la dérangerait absolument pas. Avec Soan, il n’y avait pas de prise de tête, l‘alchimie corporelle lui avait semblé des plus satisfaisantes... Alors à quoi bon chercher la complexité quand la simplicité s’offrait à nous ?

- Hormis ça, rien d'autre n’a besoin de changer.  

Bien sûr... Leur amitié restait inchangée selon elle. L’amour romantique n’a jamais fait partie de son existence... Elle ne savait pas ce que c’était de tomber amoureuse ou d’avoir des sentiments idylliques... Ainsi, peut être que cela semblait invraisemblable pour son ami. Mais pour l’héroïne... C’était clair comme de l’eau de roche. Ils pouvaient bien s’utiliser mutuellement pour combler leur manque. En tout cas... Cela lui irait bien. Il ne s’agissait pas d’une proposition de relation exclusive ou même d’un emprisonnement relationnel... Juste d’un échange de bons procédés ? Du moins... Elle préférait attendre son avis avant de fixer la moindre chose dans son esprit. Ses iris ne quittant pas les siennes afin de tenter de sonder ce que son âme ressentait..

Il a fauté.

— Il faut dire qu’ils n’étaient pas très coriaces.

Encore une fois, il parle en connaissance de cause. Il en a déjà connu des plus récalcitrants ; à commencer par lui-même à l’époque. Quoi qu’il en soit, les gamins semblaient plutôt obéissants des règles, voir le syndicat débarquer était largement suffisant pour les impressionnant ; et c’est tant mieux. S’ils avaient fait fi de ses paroles et n’avaient pas cessé malgré tout, Hongdan aurait pu se montrer plus utile.

Il ne s’attend pas à ce que sa manche soit tirée, n’a pas entendu la jeune femme se déplacer. Il finit par soupirer à ses paroles, mais il n’essaye pas de s’échapper de son emprise, ne cherche pas à la repousser. Et visiblement, il ne cherche pas à nier non plus.

— C’est vrai.

Soan n’est pas du genre à prendre ses amis pour des idiots. Il sait à quel point cela peut être humiliant et désagréable – il préfère donc prendre des inconnus pour des idiots, c’est plus facile.

— J’ai eu l’air de passer un mauvais moment ?

Et le voilà, avec son piquant. Il ne peut pas s’en empêcher – il est comme et fort est à craindre qu’il est déjà trop tard pour le refaire à son âge. Mais malgré tout, c’est sa façon à lui d’être sincère, et de dire que lui aussi, il a bien aimé.
Sa main dans la sienne semble l’effrayer, même s’il ne commente pas dessus. Malgré tout, il enlève délicatement sa main de celle de la jeune femme. Il ne veut pas la vexer, mais toutefois il ne se sent pas assez à l’aise dans la tournure que prend leur relation pour avoir ce contact avec elle.

— J’avais peur d’avoir tout gâché et que la situation crée un malentendu. Après tout on s’est laissé porté sur le moment et on a jamais discuté de ce que pouvait être notre relation.

Il faut qu’il soit honnête, et quoi qu’il en soit ; il n’y a pas cinquante façons de le dire. Au moins il sera fixé et les choses seront claires en ce qui le concerne.

— Je ne veux pas qu’on se mette ensemble ou qu’on soit romantique l’un envers l’autre. Je ne veux pas que ça change.

Soan finit par se taire un moment, avant de se racler la gorge doucement. A croire qu’il ne fait pas trop le malin non plus, dans cette situation.

— Mais je ne regrette pas non plus.

L’idée de recommencer ne lui déplairait pas non, mais il choisit de se taire, choisit de détourner le regard, son corps suivant avec lui alors que le fait d’y avoir pensé et d’en avoir envie à nouveau le ferait presque rougir. Preuve en est qu’ils sont deux adultes en manque d’affection.