rock bottom || haejin

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Tell me how did we get here?
16/08 ,, 21h19

S

'il devait prendre le temps de réfléchir à quand remonte la dernière fois où il s'est tenu devant une figure proche du mentor, Paperthin ne s'en souviendrait pas. Parce que sa mémoire se déchire à la manière d'un vélin trop fragile pour supporter le poids des années et des mots venus se coucher dessus. Peut-être du temps où il était encore à l'institut. M. Yang, très certainement.
Quand il a été trainee, sur le fil de ce qui est pour lui une autre vie à présent. Il en fronce un instant les sourcils alors qu'il tente de déplier les papiers de sa mémoire. Abandonne sur un soupir tout en jetant sa cigarette à terre pour l'écraser sous sa semelle. Tu fumes trop Sipi. La remarque que lui avait faite Sip était d'une ironie sans fond, lui qui fumait plus que de raison simplement parce que c'était son pouvoir – la belle excuse. La cigarette est un mal comme un autre qui le tenait éloigné des autres tentations naviguant sur la surface houleuse du marasme sombre lui servant de mer intérieure.

Le sachet de papier qui se froisse contre son poing en est une. Etrange allié même qu'il ne pensait pas un jour fréquenter de cette manière. Il se souvient des nuits sans fin dans cette chambre de motel vibrant d'hormones, de tabac et d'alcool. Ces moments de grâce où tout semblait si simple et où l'ivresse était d'une délicatesse presque insolente. Ses récentes ivresses n'ont rien de délicat. Elles cognent, dur, là où les maux s'entassent. Ferme intention de les éclater en morceau mais ne récoltent que des échos ronflant contre ses côtes, distillent des nouveaux filins de douleur avec lesquels il apprend à vivre. Et tous les mods du monde ne pourront couper ce tourment. Il est intime, trop personnel et profond pour que pouvoir être touché par une technologie changeant les êtres vivants en machine.
Ca tombe bien, il en est déjà une.

L’ascenseur le crache sur le boyau d'un couloir désert dont la seule vision lui colle une claque de frisson sur la nuque. Enjambant les foulées jusqu'à la porte du bureau qu'il convoite, Orion frappe. Deux coups lents mais incisifs. Le filin de lumière filtrant sous la porte atteste une présence de l'autre côté du morceau de bois qui lui parle un instant avec une voix masculine venant immédiatement résonner au fond de sa caboche. Elle avait un meilleur écho, sous terre, entre les murs d'une salle de la prison d'Athena la Grande.

« - Someone once told me that overtime should always be done while staying hydrated, it helps you get through the night. So, I'm providing. » Le poing au sac de papier se lève en direction du bureau, Paperthin refermant la porte avec la discrétion d'une feuille de papier effleurant la surface cotonneuse d'un sol recouvert de moquette.
Vient alors le moment où son regard se pose et croise celui de son aîné. Le frisson revient, double claque sur la nuque et les reins cette fois. C'était quand la dernière fois qu'il s'est tenu devant lui ? En taule, évidemment.

Le sac se dépose sur le bureau avec un bruit caractéristique de verre qui s'étouffe. Paperthin tire un fauteuil de l'autre côté du meuble, à la lisière du halo de lumière dessiné par la lampe et avant de s’asseoir, il s'incline.
« - It's been ages sunbaenim. » Il l'appelait hyung à l'époque encore. Ce soir, l'honorifique sur sa langue éveille l'esquisse d'un sourire aussi moqueur qu'il est cynique. Aussi ronflant que le bruit de son corps se laissant tomber sur l'assise, ses jambes raclant le sol pour s'étendre devant lui.

« - I thought we had to celebrate, you being my baby-sitter. I'm not shitting with you, it comes from Daegu. I was still there this morning, though I could bring you a gift. » Désigne du menton le sac et l'éclat d'une bouteille de soju de bon cru.

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16/08 ,, 21h19

I

l n’avait pas vu les heures filées comme à l’accoutumée, enfermé dans son bureau loin des bavardages de collègues qui s'empressent à quitter la tour. si son chat ne l’attendait pas à la maison, haejin – en bon esclave d’athena – serait bien resté toute la nuit pour finir ce qu’il avait laissé traîner depuis plusieurs jours. qu’il détestait l’administratif. la pile de documents refusait de se réduire, et l’agent éloigné du terrain se décida à passer à l’acte, le regard dédaigneux. le bureau empestait la clope sous l’indifférence du coupable, acceptant l’intoxication si elle devait arriver ; elle serait toujours aussi douce que ce qu’il faisait à cet instant. son égo prend brièvement le dessus, se refusant à penser que cette situation l’aiderait à oublier sa position actuelle. frère sorti de nul part, adoption jamais mentionné par ses parents, sa grande soeur. ça lui laissait un goût amer, l’identité subitement floue avec son sang aussi exécrable qu’il semblait trouver la situation. l’agent ne tarde pas à chasser ses idées de la tête, pestant un court instant et lâchant une vague insulte à l’égard d’harim avant de continuer dans sa lancée, lancée subitement interrompue par la porte toquée. invitation lancée en retour, sans lever les yeux, s’attendant à voir le même nouveau qui lui tournait autour mais c’est un tout nouveau spectacle qui s’offre à lui. la renaissance d’un héros.

il trouvait paperthin un peu trop à l’aise, à apparaitre sans se faire annoncer huit années après. son bras est en suspens, feuille à la main, clope au bec, à assister à la scène. comme une scène on ne peut plus normale, avec orion de passage qui lui ramenait de quoi boire, alors qu’il se rappelait encore de ces pas fermes qui faisaient écho entre les murs de la prison, jusqu’à voir son visage derrière les barreaux. haejin ne savait pas à quoi il ressemblait à cet instant mais il se rappelait la sensation de son visage contracté avec colère, incompréhension. l’inverse en revenant au présent, complètement impassible face au fantôme qui lui faisait face, et qui s’installe comme si de rien n’était. les prunelles dévient, cherche une information sur le calendrier accroché et fait le compte. 2015, 2024. le compte était bon. l’attitude nonchalante de l’homme qui articule la raison de sa visite l’empêche de se réchauffer. pas moyen quand il avait en face de lui un de ses échecs.

le corps redevient élastique et la feuille en suspens est posée sur le bureau pour être définitivement oubliée. haejin lâche son cadet du regard pour se concentrer sur la bouteille posée en guise d’offrande. décapsulée et avalée à moitié sans le proposer à son invité, comme pour se donner une dernière chance. une illusion qu’il avait involontairement créé, en vain. « you’re out. » ses souvenirs étaient encore vifs, il se rappelait du ton haussé pour lui faire cracher le morceau, pour comprendre pourquoi son ancien élève avait fait ça, pourquoi. arrête du nez pincée pour reprendre contenance, « who the hell, y- », péniblement. « who came up with this wonderful idea. » ça lui ressemblait pas, d’être irrité de cette manière, contre lui. de la frustration qu’il ne pensait pas ressentir, comme ce visage qu’il n’aurait jamais cru revoir. et qu’il n’avait jamais cherché à son tour.

@jeon orion

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16/08 ,, 21h19

O

rion acquiesce simplement. Avec le calme d'un océan avant l'arrivée d'une tempête prête à détruire le monde. Il a bien vu, le trouble provoqué par son arrivée. Son retour d'entre les morts. En a pris un certain plaisir que le sourire léger ornant ses lèvres atteste presque éhontément. Il n'y a plus de barreaux ce soir. De salle aux yeux multiples. De matons prêts à tabasser au moindre mot de travers. Il n'y a plus d'aveux à arracher de sa gorge trop sèche d'un marasme fait de trouille, de regret, de désespoir et d'autres formes de sentiments qu'il n'a pas envie de décortiquer aujourd'hui.
Il est dehors. S'improvise petit démon propulsé hors de sa boite de malheur par la force d'un ressort depuis trop longtemps contenu.

Le regard sombre suit le mouvement. Cette bouteille qui se vide et dont la seule vue entortille au creux de son ventre une envie méchante, éveille sur sa langue les picotements d'une soif violente. Qu'il refrène avec la ferveur d'un fou se sachant déjà perdu. Il boira seul, une fois de retour dans l'antre ridicule et temporaire de cette chambre qu'on lui alloue le temps où il sera encore en déplacement, avant qu'il ne puisse s'improviser locataire d'un logement décent.
D'adulte.

« - Who knows. Ask our superiors, they might give you the right answer. » Ô ils savent très bien qui a eu cette idée. Elle est Grande et rien ne peut aller contre sa volonté. « - Some big brain up there thought I needed to be supervised, seems it's the procedure when a hiatus ends. You know, to fit in right and stuff. » Il hausse les épaules et fait tourner son poignet ganté au creux du vide surplombant son genou, à la manière d'un carrousel nettoyant une saleté invisible.
Ce n'est qu'après quelques secondes d'immobilisme qu'Orion se détache du dossier de son siège. Se penche vers l'avant, vers la lumière. Vers ce frère oublié sur la ligne d'une autre vie délavée, abandonné aux détours d'avant lui donné l'impression d'avoir trahi l'univers entier pour s'apporter un peu de salut sur le fil du rasoir de sa détention.
Orion ne sait pas, si cette confession a été à l'origine de ces huit ans loin de tout. Si elle a permit d'alléger sa peine et de le faire se tenir ici ce soir au lieu de le voir continuer à pourrir, là-bas, jusqu'à la fin de sa triste et misérable vie. Il aurait du crever, en prison. Comme tous les assassins sur qui le monde bien pensant crache sans vergogne.

Il se penche et tend le bras pour récupérer la bouteille. En avaler une gorgée sans se soucier de porter à ses lèvres le goulot touchées par celles d'un autre. Peut-être même que le regard animé par l'éclat de la lampe qu'il pose sur Haejin est une provocation muette à laquelle il se laisse volontiers aller.

« - Don't get any ideas, this business is fucking me up too. I'm too old for this, but eh, let's take this the good way, we'll have plenty of time together to make up for lost years. Geonbae hyung ! » Et une seconde gorgée de soju glisse, réchauffe sa poitrine à en faire tressaillir ses veines et le sang ruant en leur sein.

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16/08 ,, 21h19

d

e l’irritation à cette sensation d’anesthésie à ne pas savoir ce qu’il devait vraiment ressentir. le soju n’aide pas, sans surprise, mais le réveille un peu en cette fin de soirée. le problème, c’était qu’il s’était battu pour orion, battu si fort que sa propre disparition par la suite n’avait pas le moindre sens. assez pour ne plus vouloir y penser, pour comprendre ce qu’il y avait dans la tête pour agir de la sorte ; complètement abruti par sa peine. et il recommençait à nouveau, à poser d’idiotes questions alors que la réponse était devant lui. évidemment que c’était eux qui avaient pris cette décision, de devenir le garde-fou de paperthin. « of course, who else could it be. » flegmatique, au fond de son siège. et en parfait soldat, lui qui se plaignait si facilement, acceptera sa nouvelle position sans affronter ses supérieurs aux décisions absolues. haejin savait d’avance qu’aucun appel ne serait répondu.

un long soupir est poussé en retour alors qu’il enfouit son visage dans ses deux mains pendant de brèves secondes, et tenté de se reprendre. « and what idea do you think i might have? » subitement inquisiteur après l’avoir vu boire dans sa bouteille non sans un hochement de tête, et une réalisation subite ; comme autrefois. deuxième gorgée de son cadet, et sa légèreté lui donne envie de faire valser la bouteille de l’autre côté de la pièce. « stop that. » trop jeune pour ça, et ça le ramène des années en arrière avec en face de lui un orion qui a seize ans et encore toutes ses dents. et cette nouvelle recrue avait poussé tel un arbre sans pour autant le dépasser, mais il y avait assisté, non pas sans fierté. haejin avait assisté à tout ça, de l’envol jusqu’au crash. de ces échanges avec ses collègues quand il leur disait de prendre soin de son petit-frère jusqu’à forcer l’échange pour qu’il lui lâche la terrible confession. « first. they love to give me work as if i had nothing to do. » qu’il peste avant de fouiller dans ses tiroirs et de sortir deux verres à la propreté douteuse. après huit ans, il ne savait pas s’il avait affaire à la même personne à un inconnu. est-ce qu’il savait qu’haejin doutait de lui ? c’était puéril de sa part, mais si seulement orion lui avait fait vraiment confiance depuis le début. « you're acting like nothing's wrong, it's pissing me off. » i don’t know how to act around you. qu’il se retient de rajouter. haejin aurait pu essayer de le sauver.

@jeon orion

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16/08 ,, 21h19

«

 - Don't know, I'm not in your head, mine and its mess are enough already. » Orion se fige à l'injonction. Lève les yeux vers son aîné qu'il scrute un long moment de son regard noir d'enfer. Les doigts contre la bouteille s'y crispent un instant, attendant la suite.
Cette sentence qui ne tombe pas et fait s'affoler son cœur. Il avait fait pareil, lors de leur dernière conversation. Ils étaient deux, une table entre eux. La différence étant qu'Orion avait des chaînes à ses poignets et chevilles. L'esprit vague des drogues injectées pour le maintenir en ligne. Du chagrin se dégueulant sans discontinuer de sa poitrine ouverte par la perte de sa partenaire. Un instant de faiblesse, pris au bon moment par cet homme assis en face de lui et il avait avoué. Délié sa langue pour détruire la promesse faite de ne rien dire de ce pacte ignoble l'ayant envoyé là.
Huit ans, ce n'est pas ce qui était prévu, au départ. Il devait y rester, jusqu'à la fin de sa misérable vie. Il avait alors compris, bien plus tard que cet allègement inattendu de sentence ne venait pas seulement de la miséricorde intéressée d'Athena mais bien de l'action de Haejin. La mort dans son cœur avait alors, sur un tempo fugace, céder sa place à une profonde reconnaissance.

« - Everything's wrong, we both know it. » Souffle-t-il, amer, tout en reposant la bouteille sur le bureau avant de reprendre place au fond de son siège, cheville posée sur un genou et les bras croisés sur son torse. « - We've came this far only to serve even if we don't want it. Maybe we're both insane because of it all, who knows. » C'est une notion bien vague, en fin de compte, la folie. Et Paperthin était bien vite arrivé à la triste conclusion que n'importe qui sur cette foutue planète est le fou de quelqu'un.
Un silence s'étend.
Long et lourd de non-dits. La conversation se joue dans leurs regards qui s'enchaînent. Orion creusant celui de son aîné comme s'il cherchait à atteindre les profondeurs de son âme.  

« - Am I scaring you ? Disturbing you ? » Le coin d'un sourire monstre glisse sur ses lèvres. A peine une seconde puis il disparaît. Leur rend cet hermétisme verrou que le monde exige de ceux de son engeance.
« - I might be, insane, you know but I'm not stupid nor blind, well, this I am actually, partially, anyway... Tell me, hyung, what is really pissing you off about me being here ? »